vendredi 12 novembre 2010

Dessin bleu.Crayon de couleur sur papier.120x80cm.2010.

Je laisse le crayon parcourir la feuille sans penser à rien, à l'aveugle. Je choisis en général un moment de grande fatigue, tard le soir, ou après une journée harassante, quand mes nerfs sont en boule.



Mon attention se focalise sur une musique et ma conscience se fait flottante comme si je rêvais tout éveillé. Je me laisse guider et entraîner avec une grande jouissance par les rythmes et les impulsions.
 Des réseaux de traits anarchiques et d'arabesques saturent progressivement la surface du papier. Je continue encore et encore à couvrir la feuille, les écheveaux de lignes deviennent complexes, des traits appellent mon crayon et j'y insiste. 




 Alors des visages ainsi que des animaux surgissent. Ils réclament impérieusement d'accéder à une existence et je la leur donne immédiatement, obéissant à leur volonté:  il me suffit de cerner des contours dont je n'avais pas prémédité la silhouette,  de détourer des formes qui se confondaient sous les traits, en gestation depuis le début. 


A mon insu et à mon invu. 




C'est une prolifération d'êtres surgis d'une étrange Antiquité qui se pressent sous mon regard, une foule comprimée d'existences qui n'attendent que mon attention pour se précipiter sur la feuille et occuper tout l'espace, revendiquer la justice du crayon contre un mystérieux oubli. L' espace devient petit à petit irrespirable et menaçant, des forces occultes que je ne maîtrise pas veulent soudain prendre possession de mon geste et mener le jeu.




 Je résiste, mais je sens que dans cette épreuve de force je ne serai pas le vainqueur.Alors j'interrompt mon dessin, lâchement, avec le douloureux regret d'avoir perdu des figures effarantes et l'envie décuplée de recommencer l'épreuve dans un nouveau dessin. 


                                      

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